Dans la cuisine animée du Mazerand, sous l’œil attentif de Jacques Mazerand, président de l’association des Chefs d’Oc de Montpellier, une rencontre inédite s’est dessinée. Laurent Imbert, figure du groupe Grim et fervent adepte du sport automobile, troque aujourd’hui ses outils numériques contre les ustensiles de cuisine. Au menu, une fusion de tradition et de modernité : une recette alliant le raffinement du foie gras à la simplicité des Saint-Jacques. L’occasion de découvrir le parcours de Laurent Imbert, bien au-delà de ses réussites professionnelles. Une interview à cœur ouvert, saupoudrée d’anecdotes personnelles et de réflexions sur l’évolution de la gastronomie et de la technologie.
On vous connaît à travers vos fonctions professionnelles, mais on connaît peu l’homme… Racontez-nous votre parcours…
Je suis un pur produit montpelliérain. J’ai fait mes études supérieures à Nice à la SKEMA Business School. Puis je suis revenu ici faire un DESS sur la gestion de PME. Ensuite je suis parti vivre aux États-Unis. C’est un voyage qui a beaucoup compté dans ma vie. J’aurais pu rester là-bas, mais ici j’avais l’entreprise familiale… Le groupe Grim… Voilà. Je suis revenu et j’ai commencé le métier, à la base, comme vendeur. Comme tout le monde dans la famille. Le choix a été vite fait alors… Je ne dirais pas cela, mais le rapprochement familial a compté. Je ne suis pas carriériste dans le sens où j’accorde aussi beaucoup d’importance aux valeurs humaines.
Aujourd’hui, vous êtes membre du directoire…
Tout à fait. Le groupe Grim, ce sont deux familles associées, représenté par Marc Grégoire, et le côté Imbert, représenté par Sébastien, mon frère et président du directoire, ainsi que moi-même.
Vous êtes le directeur des systèmes d’information du groupe. Concrètement, qu’est-ce que cela signifie ?
On va dire que je m’occupe de la stratégie Hardware et Software du groupe. Mon rôle est d’optimiser les outils qu’utilise le groupe, du mécanicien au commercial, en passant par la comptabilité. Et puis il y a la gestion de la data qui est devenue primordiale aujourd’hui. C’est l’avenir. J’ai 45 ans, j’ai connu l’arrivée d’Internet et je le pense, la prochaine révolution, c’est l’intelligence artificielle. Et je ne crois pas qu’il faille en avoir peur. Il faut se l’accaparer.
Quels sont les défis et les opportunités ?
Je dirais retrouver de l’efficience. Le groupe s’est vite développé, les outils changent et évoluent très vite, tout comme les mentalités et les métiers, on est dans une vraie révolution, aussi bien professionnelle que personnelle d’ailleurs, j’ai l’impression. Il faut être agile et essayer de retirer le meilleur de tout ce mouvement pour l’intégrer et être efficient. Nous avons tout un tas de plans d’action. Je souhaite simplement qu’ils fonctionnent. Nous avons un leitmotiv dans le groupe, c’est le respect. J’aimerais que cela perdure, que les collaborateurs soient heureux.
Le pont entre l’héritage familial et les innovations se fait-il facilement ?
C’est tout l’enjeu… on a 800 salariés. Il faut le cultiver, cet héritage.
Vous êtes aussi vice-président de CAP 34, de quoi s’agit-il ?
C’est une association d’une cinquantaine d’entreprises qui agissent sur l’Hérault, toutes non concurrentes entre elles, afin de favoriser les échanges. L’objectif est de soutenir et de développer le marché local des entreprises membres grâce à la recommandation. Parce que finalement, c’est souvent ainsi que cela fonctionne. On recommande des personnes quand on les connaît, et on ne les connaît qu’en passant du temps, des moments de qualité avec elles. Et cela fonctionne. C’est très enrichissant et c’est encore une fois une question d’ouverture. Je suis ravi d’être à la vice-présidence de cette association. Nous fêtons nos dix ans cette année.
Allez-vous organiser un événement pour cet anniversaire ?
Un gala pour les Restos du Cœur. L’objectif est de récolter des fonds pour qu’ils puissent acheter des camions frigorifiques. L’an passé, nous avons pu recueillir la somme de 20 000 € pour l’association Grégory Lemarchal, ce qui a permis d’ouvrir une chambre d’accueil au centre mucoviscidose, de Montpellier.
Vous êtes également un passionné de course automobile…
C’est quelque chose que l’on a toujours partagé en famille, avec mon père et mon frère, avec qui j’ai eu la chance de faire du karting. Puis j’ai construit ma propre voiture de rallye avec l’un de mes meilleurs amis, mon copilote. Nous avons arrêté lorsqu’il est devenu père. C’était dangereux, et c’est une responsabilité que je ne voulais pas prendre. Et puis à mon tour j’ai eu deux magnifiques enfants, je me suis marié, j’ai mis cela de côté. Aujourd’hui je suis pilote sur la Legends Cars Cup.
De quoi s’agit-il ?
Ce sont des petits bolides au look rappelant les années 1930-1940. Les États-Unis, la France, le Benelux, l’Angleterre, le Canada, la Suède, la Finlande, le Mexique, le Brésil, le Maroc, la Russie… c’est la formule de promotion la plus vendue au monde. On a tous la même voiture, c’est vraiment une affaire de pilotage.
Qu’est-ce qui vous plaît dans cette discipline ?
Quand je mets le casque, je ne pense plus à rien. Je suis bien, la vitesse vient titiller tous mes sens… L’odeur de l’essence… Je suis tout simplement dans l’instant.
Aujourd’hui nous nous retrouvons dans une cuisine… Qu’est-ce que cela évoque, pour vous ?
Ma grand-mère. J’ai un tas de souvenirs de tablées préparées par ses soins, elle était une incroyable cuisinière. Mon grand-père était aussi très exigeant sur la question (Rires).
Je crois que vous connaissez bien Le Mazerand…
C’est un bel établissement qui a su garder une régularité constante et une belle cuisine, authentique. J’ai de très agréables souvenirs ici.
Qu’aimez-vous dans la gastronomie ?
L’identité qu’un chef parvient à transposer dans une assiette. Comme dans le vin d’ailleurs, j’aime connaître le vigneron, sa philosophie de travail. Je suis aussi très attentif aux métiers de la salle. Ce sont aussi eux qui garantissent le succès de l’expérience. C’est avec eux que va se faire toute la différence.
Et à l’inverse, qu’est-ce que vous n’aimez pas ?
La critique, si elle n’est pas constructive. Certains avis Google par exemple me rendent très triste. C’est un peu le malheur de notre société. Aujourd’hui, tout le monde se pense spécialiste en tout. Ces personnes oublient souvent qu’il y a des hommes et des femmes, des heures de travail derrière une assiette. Il faut rester ouvert, le goût finalement relève d’une certaine subjectivité.
Et vous, comment jugeriez-vous l’évolution de la gastronomie de ces dernières années ?
En restant ouvert ! (Rires) Nous avons une multitude de restaurateurs et de chefs de très grande qualité qui réalisent des choses qui ont du sens. J’éprouve beaucoup de ressentiment envers les industriels qu’on laisse faire aujourd’hui, et qui nous proposent des produits qui sont des poisons. Je cuisine pour mes enfants et je prends plaisir à le faire. Quand on voit tous ses rappels de produits, cela fait peur.
Pour finir sur une note un peu plus légère, si vous étiez un vin et un plat, lesquels seriez-vous ?
Si j’étais un vin, je serais une Syrah. Elle est toujours très généreuse, toujours très ouverte à toutes les papilles. Un plat… probablement un pot-au-feu, parce que c’est un plat que l’on pose au milieu sur la table, c’est chaleureux, c’est mijoté la veille pour le lendemain. C’est réconfortant.