La Maison Auzier Chabernac La friandise locale  depuis 1920

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Installée ici depuis la Révolution, la famille Auzier est la seule qui maintienne aujourd’hui une vraie gloire locale : le bonbon à la réglisse. Mélange de sucre, de gomme arabique et d’extrait de racine de réglisse, cette douceur est aussi spécifique à Montpellier que le calisson à Aix.  Dans cette ville de médecins, toujours bien approvisionnée en plantes et en épices, l’objet fut d’abord une douceur d’apothicaire. On la disait antitussive et souveraine pour les maux d’estomac. Ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle et au début du XXe que l’histoire prit une tournure plus gourmande, quand les confiseurs s’en mêlèrent, et, parmi eux, les Auzier.

UNE HISTOIRE FAMILIALE

Il y eut d’abord Léon, le fondateur de la petite réglisserie familiale en 1923. Les friandises, il connaît : avant la guerre, il a travaillé à la chocolaterie Matte, dont le directeur n’était autre que son père. Rue de l’Ecole de Droit, son atelier n’est pas grand, mais il y fabrique notamment la réglisse au miel qui connaît alors une grande vogue.
Peu à peu, les réglisseries ferment les unes après les autres. Sauf Auzier, où Guy, le fils, prend les commandes en 1949. La fabrique, emploie alors une dizaine de personnes. En plus de la réglisse, il décide de se diversifier en proposant des pâtes tendres vanillées, des guimauves et les fameuses dragées dans sa boutique de la rue du Faubourg du Courreau, à deux pas de l’atelier familial. Il devient le fournisseur attitré de la bourgeoisie montpelliéraine. En 1975, il rachètera même un de ses derniers concurrents, la réglisserie Chabernac, fondée elle en 1890.

 

UN TRAVAIL ARTISANAL

C’est à Saint-Gély-du-Fesc, à une poignée de kilomètres au nord de Montpellier que Guy Auzier déménage sa fabrique il y a vingt-cinq ans. Dans l’atelier, l’air embaume vanille et sucre cuit. Une trentaine de personnes continuent d’y produire les spécialités maison et d’innover. Aujourd’hui, c’est sa fille, Magali, qui dirige l’entreprise, la dernière donc à fabriquer de la réglisse montpelliéraine de manière artisanale. De son enfance, Magali garde en mémoire les odeurs de sucres et de vanille, et surtout le bruit des machines. « Nous avons toujours habité au-dessus de la fabrique. Je me souviens surtout du bruit caractéristique de la pression dans les tuyaux ».
Toutes leurs confiseries sont réalisées dans le respect des recettes d’autrefois, jalousement gardées depuis plus de 90 ans. « Nous avons un fond de commerce avec les pâtes à la réglisse dont la recette n’a pas bougé, grâce à l’utilisation de produits uniquement naturels », précise Magali Auzier. « Mais nous savons nous adapter aux goûts et aux nouveaux packagings. »
Un soin tout particulier est apporté à la sélection des matières premières, afin de garantir une qualité constante, et satisfaire une clientèle de fins gourmands. Dans son modeste mais actif bureau de Saint-Gély-du-Fesc, situé entre atelier et boutique, elle doit jongler pour trouver les meilleurs fournisseurs aux meilleurs prix. Comme autrefois, c’est à l’étranger que la maison Auzier va chercher de quoi fabriquer sa confiserie: poudre de réglisse chinoise, gomme arabique tchadienne ou soudanaise, il n’y a guère que le miel qui soit français. « Une de nos difficultés, ce sont les coûts fluctuants des matières premières comme la gomme arabique, ou même le sucre de canne », explique Magali Auzier. « J’ai commencé ici en pliant les lettres et en léchant les enveloppes. » Aujourd’hui, elle porte un regard plein d’acuité sur ce métier qui fut longtemps l’apanage des hommes. Elle peut se laisser aller à son sens du commercial mais aussi à son intérêt pour le design et le packaging.

DE L’ALICAMENT AU BIO

Depuis quelques années, elle travaille en collaboration avec des laboratoires pharmaceutiques et propose des produits qui combinent les notions d’aliment et de médicament. La Maison Auzier-Chabernac s’est également lancée dans la production de bonbons bios. Leur gamme reste dans la tradition et reprend les essentiels de la maison, pâte vanillée et réglisse au miel associée aux bienfaits du bio. De plus elle propose une ligne « bien être » avec une gomme miel propolis pour combattre les attaques de l’hiver et une gomme Rescue aux fleurs du Dr Bach pour rester zen toute l’année. Pari réussi, puisque le chiffre d’affaires de l’entreprise ne cesse de progresser. Auzier a même conquis plusieurs marchés européens, l’Allemagne, la Suisse et l’Espagne, ainsi que mondiaux avec le Canada et Taiwan.
Un peu de travail tout de même? « Oui, beaucoup, bien sûr », lâche-t-elle derrière un humble sourire. Perpétuer une tradition « C’est parfois épuisant », avoue-t-elle. Mais « lorsqu’on a la chance de poursuivre le travail de plusieurs générations, pas question de laisser tomber. ». Reste l’essentiel : continuer à concevoir et à fabriquer du plaisir.

Marie Gineste