“Il n’y a pas de grande cuisine, elle est soit bonne soit mauvaise”.
C’est un monument de la gastronomie locale qui vient de s’éteindre à l’âge de 80 ans. Un défenseur de la gastronomie française qui a marqué les esprits. Il incarnait le meilleur de la cuisine. Un mélange unique d’intelligence, de technique – il était à lui seul une encyclopédie culinaire, de générosité et d’humour. Un prince des fourneaux sachant ne jamais se prendre au sérieux. “Il nous quitte en laissant un grand vide. Georges était un homme de partage et d’une grande bonté”, témoigne Jacques Mazerand, président de l’association des Chefs d’Oc.
On ne peut que confirmer. En février 2018, cet amoureux de la bonne cuisine nous avait emmenés à la découverte du Lubéron, une région un peu à son image, authentique et de caractère. Il aimait venir s’y ressourcer en famille. Georges Rousset était un mari attentionné, un père aimant et un grand-père dévoué. Si nous connaissions le cuisinier, ce jour-là, nous avions découvert l’homme : sa bienveillance, son amour de l’autre et son histoire qu’il nous avait racontée sans filtre.
A priori, rien ne prédestinait le garçon né à Aubagne à la carrière qui l’attendait. Et pourtant… Après avoir obtenu son baccalauréat, il finit par convaincre son père et démarre son apprentissage chez Arnould, à l’époque l’une des meilleures tables de la cité phocéenne. Il fera ses armes au Vendôme à Aix-en-Provence auprès de Charles Janon puis au Lutetia où il sera chef saucier, au George V et au Lucas Carton à Paris avant une première place de chef au Miramar à Biarritz et une seconde au Savoy, un hôtel de la famille Rothschild.
En 1971, il s’installe à quelques kilomètres de Montpellier et ouvre La Crèche à Saint- Martin-de-Londres. Le succès est rapide : l’établissement obtient 2 toques au Gault et Millau en 1974. En 1987, il crée, avec son fils Thierry, le restaurant Les Muscardins où la magie opérera jusqu’en 2011. Décoré chevalier de l’ordre national du Mérite, Toques Blanches, membre d’honneur de l’association Chefs d’Oc, Maître Cuisinier de France, dont il était le vice-président d’honneur mais aussi conseiller de l’enseignement technologique…
Georges Rousset connaîtra une vie professionnelle et associative particulièrement dense. Il mettra un point d’honneur à transmettre son savoir et formera des générations entières de cuisiniers. “La transmission si chère à notre métier faisait partie de ses gènes”, souligne Jacques Mazerand. Par-dessus tout, le chef possédait une culture culinaire très rare nourrie par ses nombreux voyages. Japon, Chine, Émirats arabes unis, Canada, États-Unis, Mexique, Maroc ou encore Mongolie, un pays pour lequel il entretenait un affect particulier. Ambassadeur de la “nouvelle cuisine” montpelliéraine des années 70-90, il a, par son action, incontestablement changé le visage de la gastronomie locale. Nous mesurons par la place qu’il prend désormais dans nos vies, le témoin du monde qu’il a été.