Dans la famille, on est de bons mangeurs
On peut être une grande sportive et aimer la bonne cuisine. Gaëlle Skrela, capitaine du BLMA et pilier de l’équipe de France de basket, parvient à concilier plaisir de la table et exigence du haut niveau. Et visiblement, c’est une histoire de famille.
CHEFS D’OC : Gaëlle Skrela, Paul Courtaux, le chef du Saint-Georges, assure qu’il vous connaît depuis plus de 10 ans. C’est vrai ?
Gaëlle Skrela : Oui ! Il connaît bien ma belle-famille. Je l’ai rencontré chez mes beaux-parents, il y a plus de dix ans. Depuis qu’il a monté son restaurant, on y va de temps en temps. On y passe un agréable moment, c’est très bon ! Quand on va au restaurant, c’est pour bien manger, choisir des choses qu’on ne ferait pas à la maison. Ce restaurant est pile dans ce qu’on recherche.
Vous êtes capitaine du BLMA et cadre de l’équipe de France de basket. Votre père et votre frère sont d’anciens joueurs du XV de France. À quoi ressemblent vos repas de famille ?
(Elle sourit). On est plutôt des bons mangeurs ! Quand quelqu’un est invité, il vaut mieux qu’il ait de l’appétit : il est bien reçu, et tout le monde est content ! Au quotidien, on fait tous plus attention. Mais lors des repas de famille, on se lâche un peu !
C’est quoi un repas de victoire ?
C’est souvent au restaurant, quand on est à l’extérieur. Comme on joue beaucoup contre des clubs du Nord, ou de l’étranger, on ne rentre que le lendemain. Le club prévoit un peu les choses. En général, ce qu’aiment les filles, ce sont les desserts, genre un fondant au chocolat. Cela peut être aussi un steak avec des frites. Alors que les frites, c’est interdit avant le match !
Vous n’en avez pas un peu marre, des repas sportifs ?
Si, des fois, c’est un peu barbant ! On dirait qu’on est un peu malades ! Il y a zéro matière grasse, pas de sauce. Entre trop et pas assez…
Vous étiez à Rio pour les JO, cet été. Certains athlètes ont critiqué les repas du Village olympique. Qu’en pensez-vous ?
On était dans un pays pauvre, on a vu des gens qui vivaient vraiment dans la misère. Nous, on avait à manger, il y avait pas mal de choses différentes. Donc je trouve que c’était pas mal, par rapport au pays où l’on était. Apparemment, c’était moins copieux que lors des Jeux de Londres. Mais on parle d’un pays développé et d’un pays en voie de développement. Donc il faut remettre un peu les choses dans leur contexte. On mangeait à notre faim, il y avait des menus qui respectaient toutes les religions. Ce n’était pas du quatre étoiles, d’accord, mais les Brésiliens ont fait du mieux possible.
Vous avez pu tester la gastronomie brésilienne ?
Non, malheureusement, nous, on a joué jusqu’au bout ! Donc, pas possible de sortir… La seule chose que j’ai goûtée, c’est une caïpirinha. Mais bon, on ne peut pas mettre ça dans la gastronomie ! Je le regrette un peu, en fait. Ma famille était là, ils ont goûté de très bonnes viandes grillées. Ils se sont vraiment régalés. Il y avait des choses typiques, comme boire le lait de coco dans les noix. C’était aussi la saison des bonnes mangues. Moi, j’ai tout raté, même la médaille !
Selon les disciplines, les règles sont plus ou moins strictes. Que mange une basketteuse internationale ?
J’aime manger, j’essaye donc de choisir des produits de qualité. Cela a un coût, forcément, mais c’est important. Ce sera en général une viande de chez le boucher, du riz. Et beaucoup de légumes : c’est important pour la santé, et pour la récupération, ils apportent plein de bonnes choses. Un repas, c’est souvent une protéine, du riz, un légume.
On dirait une diététicienne !
Quand vous mangez mal, vous le sentez sur le terrain. On peut faire un excès ou deux dans la semaine, mais cela ne peut pas être tout le temps. Quand vous prenez des repas équilibrés, vous pouvez tenir tout un entraînement. Même si vous avez la sensation de faim, vous ne manquez pas d’énergie. Alors que si vous mangez une pizza ou un Mc Do, au bout d’une demi-heure d’entraînement, vous n’en pouvez plus. Pour moi, c’est capital.
Est-ce que le club surveille votre alimentation ?
Non, pas énormément. Le coach nous fait confiance. Il dit qu’on est professionnelles, et qu’on doit savoir ce qui est bien pour nous. De toute façon, lorsqu’on mange chez nous, avant de jouer, il ne peut pas venir vérifier notre assiette…
Que mange-t-on avant, et après un match ?
Avant les matchs, le coach n’aime pas trop tout ce qui est sauce. Ce sont donc les grands classiques : poulet, pâtes, haricots verts, salade composée, salade de fruits, fromage blanc. Par contre, après le match, des fois, on se fait un peu plaisir. Surtout quand on a gagné !
À la maison, qui cuisine ?
C’est en fonction des emplois du temps. Là, par exemple, je vais rentrer la dernière. Donc je pense que ce sera prêt. Mais c’est plus souvent moi, parce que je suis plus souvent à la maison. On mange vraiment de tout à la maison. De la viande, du poisson… Je m’amuse à faire des pâtisseries, quand j’ai du temps. Mon compagnon aime bien. En général, j’en mange un tiers, et lui les deux autres tiers !
Et lui, il cuisine comment ?
Édouard, il fait des choses simples, mais c’est bon ! Moi, je teste de nouveaux trucs. Des fois, ce n’est pas parfait, mais ça passe !
Un petit verre de vin ?
En fait, je n’aime pas le vin, et l’alcool en général. À part le champagne pendant les fêtes. Ne pas boire, ce n’est donc pas une privation. Après, en théorie, ce n’est pas interdit. J’ai des coéquipières qui aiment bien ça, un petit verre de vin de temps en temps. Comme pour tout, il faut trouver un juste équilibre.
Vous avez le temps de faire des repas entre joueuses ?
Des fois, on s’invite. La top cuistot, c’est Sarah. Elle a joué en Italie. Elle fait de super risottos. L’an dernier, elle nous a servi des gâteaux… On croyait qu’ils venaient de la pâtisserie !
Vous avez une spécialité ?
Pas vraiment. J’aime bien tout faire, apprendre des recettes. Par exemple, l’autre jour, mes parents sont venus, et m’ont appris à préparer le sanglier. Mais je ne suis pas un chef non plus, hein !
Vous avez de bonnes adresses pour faire les courses ? Pour les fruits et légumes, je vais en face du palais des sports de Lattes, c’est pratique. Ou alors au marché de Lattes. Le dimanche, il y a de petits producteurs. Pour la viande, c’est chez le boucher… et aussi beaucoup dans nos familles. Mon compagnon est de Lozère, mes beaux-parents nous donnent de la bonne viande. Et pour tout ce qui est volaille, c’est plutôt mes parents, à Toulouse !
Un plat que vous adorez ?
Les fruits de mer, les gambas, les seiches. Grillées, simples, à la plancha, c’est vraiment bon !
Quelque chose que vous détestez ?
Sincèrement, il n’y a rien que je déteste. Un jour, mes beaux-parents avaient préparé des tripes. C’était une des premières fois que je les rencontrais, j’étais obligée d’y goûter… Et finalement c’était bon ! Bon, les anchois, les sardines, j’ai un peu de mal…
À quoi ressemble votre cuisine ?
Elle est normale, avec pas mal d’ustensiles. Par exemple, on a des petits moules à cannelés, à muffins… De quoi se faire plaisir !
Quand vous n’allez pas au Saint-Georges, quels sont vos restaurants favoris ?
Il y a déjà le Mazerand, à Lattes. J’aime bien son « Grand huit » : huit petites choses à découvrir. On va aussi manger du poisson au bord de l’étang de Thau. Sinon, il y a le bar à sushis des Beaux-arts.
Vous avez testé les tables étoilées ?
Oui, on est allé une fois chez les Pourcel. C’était pour les 30 ans d’Édouard. Les gens autour de nous avaient l’air habitués. Nous, on était comme des gamins, on prenait des photos ! On s’est dit que peut-être, on n’avait pas le droit, mais on ne nous a rien dit !!! La présentation des assiettes c’est la folie. Et puis, on découvre des goûts, des saveurs. Des choses qu’on n’imagine pas.
Au restaurant, c’est entrée plat dessert ou petite salade ?
En général, c’est plutôt entrée plat dessert. Enfin, si le dessert me tente. J’aime plutôt le salé que le sucré, mais je préfère cuisiner le sucré, c’est bizarre ! Bon s’il y a un dessert avec du chocolat… je me laisse tenter !
Êtes-vous du genre à prendre des risques face au menu ?
Je ne suis pas très courageuse, mais mon compagnon, oui ! En fait, c’est lui qui prend, et c’est moi qui goûte ! Les plats qui sortent un peu du classique, j’ai un peu peur de ne pas aimer. Mais Édouard, il aime vraiment tout. Donc on a tendance à tout tester.
Pouvez-vous nous citer un souvenir de gastronomie ?
Je devais avoir 15 ou 16 ans, en Espagne. J’ai goûté une paëlla noire, à l’encre de seiche. J’ai trouvé ça tellement délicieux… Je suis sûre que si j’en remange maintenant, cela n’aura pas la même saveur. J’en ai un autre : j’étais allée chercher les champignons avec mon père, en Corrèze. Une dame nous a fait une tarte à l’abricot… Dans mes rêves les plus fous, j’en ai goûté des centaines, je n’ai jamais retrouvé cette saveur !
Pour finir, c’est bientôt Noël. À quoi ressemble un menu de Noël chez les Skrela ?
Normalement, ça devrait être foie gras, champagne, huitres, gambas. Après, cela dépend, une volaille, une côte de bœuf, du veau ou de l’agneau. Servi avec gratin dauphinois, cèpes, girolles… Il doit y avoir une case fromage et salade, aussi ! Et enfin, en dessert, une buche aux fruits, mais sans crème. Parce qu’on n’est pas fans. Et surtout, qu’on n’en peut plus ! Le lendemain, on n’a pas spécialement faim. Mais on remange, parce qu’on aime ça !
PROPOS RECUEILLIS PAR GWENAËL CADORET