Face au Covid 19, nos chefs réagissent

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55 jours de confinement, 22 en plus pour les cafés, hôtels et restaurants, l’attente fut longue. Depuis le 2 juin dernier, les bars, cafés et restaurants de la ville ont rouvert au public. Alors dans la région, on anticipe des lendemains difficiles, obscurcis par la peur du virus et la distanciation imposée dans les salles. Nous avons demandé à nos rédacteurs comment ils avaient vécu cette période inédite et comment ils envisageaient l’avenir.

Comme pour la grande majorité, l’annonce du confinement fut choquante. “Au départ, on s’est sentis très démunis, et en colère car la fermeture a été plus que brutale alors même que l’on autorisait la population à aller voter”, témoigne Paul. “Quand je l’ai annoncé aux membres de toute mon équipe, il était 19h45. Ils ont tous eu les larmes aux yeux, se demandant si le restaurant allait survivre”, se souvient Guillaume. Mais Carole reste objective. “Il a fallu se recentrer sur l’essentiel et retenir le positif pour avancer”.
face au Covid
Alors chacun a rebondi, à sa manière. Guillaume a choisi de passer du temps avec sa famille : “Mon épouse est infirmière et a été très sollicitée pendant ces 2 mois et demi de crise sanitaire. J’ai la chance d’avoir deux enfants formidables, qui ne demandent qu’à passer plus de temps avec leur papa. Elles ont été servies, et moi aussi ! On a vécu des moments que l’on n’aurait pas eu la chance de vivre en dehors de ce confinement. Cela a confirmé qu’il est indispensable pour le mental de trouver le bon équilibre entre le travail et la vie familiale”.
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Carole et Benjamin se sont d’abord attaqués à des travaux de rénovation tandis que Paul a choisi de se lancer dans la vente à emporter.
“ On ne savait pas au départ combien de temps cette période allait durer, donc on s’est mis très vite à faire des plats à emporter pour pouvoir au minimum payer le loyer à notre propriétaire dont c’est le seul revenu ”. Mais si le “ take away ” a permis à nos deux chefs de maintenir la barque, cette pratique ne s’inscrit que dans une dynamique de confinement. “ Je ne vois pas cela comme une activité supplémentaire nouvelle ”, explique Paul. “ Mon établissement n’est pas adapté pour faire les deux en même temps ”. Pour Carole, c’était un bon moyen de conserver “ le lien social avec nos clients ”. Mobilisée auprès du mouvement “ les chefs avec les soignants ”, elle a considéré comme essentiel “ de partager et de faire plaisir à des personnes qui exercent leur métier sans compter ”. Tout comme Guillaume pour qui c’était le moment où jamais. “ On fait un métier où l’on se doit d’être généreux. Ils ont un mérite incroyable ; si l’on a pu leur apporter un moment de réconfort, on a atteint notre seul but ”.
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Tout au long du confinement, nos trois rédacteurs ont eu à coeur de maintenir le lien avec leurs producteurs. Carole a continué de s’approvisionner chez eux, comme avant. Guillaume a fait le relais avec les particuliers de son entourage. “ C’était le moment pour beaucoup de changer ses habitudes. On espère que cela va continuer ”. Paul voit plus loin. “ J’espère simplement que cela aura pris plus de sens pour le consommateur ”. Circuit court et saisonnalité ont toujours fait partie de leur façon d’aborder la cuisine. Pour Carole, ce n’est “ pas une mode. C’est la nature qui dicte ma cuisine ”. Pour Guillaume, nul besoin d’aller chercher ailleurs des produits que l’on trouve à moins de 5 km de chez nous. “ On a réussi à le prouver, nous avons une région extraordinaire pour cela”. Et il aborde la reprise avec espoir Tout le monde a hâte de vivre des moments au restaurant comme auparavant. Peut-être que pour certains secteurs la reprise sera plus longue, mais nous devrions opérer un retour à la normale d’ici la rentrée de septembre. ”
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Paul confirme. “ Pour l’instant la reprise est satisfaisante, mais il faut absolument que cela dure. Il y en a encore beaucoup qui souffrent. Je pense notamment aux petites structures, sans terrasse. Sans parler de ceux que la banque n’a pas suivis et qui ont été obligés de plier. ”

S’il mise désormais sur plus de convivialité avec son offre d’entrée à partager, Carole et Guillaume ont choisi eux de ne rien changer.
“ Notre formule rencontre un succès depuis le début, elle a encore plus de sens aujourd’ hui. Très peu de stock, une carte très courte qui évolue chaque semaine. Cela laisse libre cours à la saisonnalité et à l’imagination. On aurait pu ouvrir le restaurant pendant le confinement, nous n’aurions pratiquement pas eu de problèmes d’approvisionnement ” explique ce dernier. Et il se veut optimiste.
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“ On a la chance d’habiter une région qui attire, et qui est déjà dotée d’une très belle clientèle locale. Aucune raison qu’il n’y ait pas de reprise des restaurants ”. Paul espère que les mois d’été seront bons mais craint globalement la rentrée. “Je crois malheureusement que l’on ne mesure pas encore dans quel péril notre économie se trouve. Et finalement, nous ne sommes que des vendeurs de bonheur, superflu, bien que vital au bien communautaire. Nous ne serons peut-être pas la priorité dans le budget à venir des Français.”
“ Il faut que les mois à venir soient faits de partage avec les clients et nos amis ”, conclut Carole.